Comment en serait-il autrement ?
Plus profonde est l’entaille découpée en vous par votre tristesse, plus grande est la joie que vous pouvez abriter.
La coupe qui contient votre vin n’est-elle pas celle que le potier flambait dans son four ?
Le luth qui console votre esprit n’est-il pas du même bois que celui creus
é par les couteaux ?
Lorsque vous êtes joyeux, sondez votre
cœur, et vous découvrirez que ce qui vous donne de la joie n’est autre que ce qui causait votre tristesse.
Lorsque vous êtes triste, examinez de nouveau votre
cœur. Vous verrez qu’en vérité vous pleurez sur ce qui fit vos délices.
Certains parmi vous disent: “La joie est plus grande que la tristesse”, et d’autres disent: “Non, c’est la tristesse qui est la plus grande.”
Moi je vous di
s qu’elles sont inséparables.
Elles viennent ensemble, et si l’une est assise avec vous,
à votre table, rappelez-vous que l’autre est endormie sur votre lit.
En vérité, vous êtes suspendus, telle une balance, entre votre tristesse et votre joie.
Il vous faut être vide pour rester immobiles et en équilibre.
Lorsque le gardien du trésor vous soulève pour peser son or et son argent dans les plateaux, votre joie et votre tristesse s’élèvent ou retombent.”
extrait du livre “Le Prophète de Khalil Gibran”